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Haïti sur fond de guerre de basse intensité

category amérique centrale / caraïbes | impérialisme / guerre | presse non anarchiste author Tuesday February 23, 2010 20:16author by Raynal Trouillot Report this post to the editors

Quinze jours après le tremblement de terre, nous sommes à l’ancien marché de Pétion-Ville, espace de transactions intenses; vendeurs et acheteurs ont envahi massivement un espace qui leur était interdit pas plus tard que trois semaines par la mairie, spéculations obligent. Une réinstallation faite dans un brouhaha indescriptible, sur fonds de monticules d’ordures mis a feu et répandant une odeur âcre. Il n’y a pas de pénurie alimentaire. On y vend de tout: denrées, légumes, fruit, viande dont une bonne part est importée. On y trouve également du salami, des paquets d’hotdogs. Le vendeur incite l’acheteur à faire son choix parmi ses marchandises exposées à même le sol.

Dans le rond point de la zone, se trouve un groupe de vendeurs d’eau et de boissons palliant à la pénurie chronique d’eau de la Centrale Autonome Métropolitaine d’Eau Potable (CAMEP): Coca Cola, Sprite, Cola Couronne, Toro, Ragamann etc…
De l’autre côté de la rue, face au marché, d’autres vendeurs proposent un ensemble de produits sans aucune valeur nutritive, servant à tromper la faim de la population et qui consistent en “bonbons” et sucreries importés de la République Dominicaine.
Par-ci par-là, des véhicules passent, surtout ceux du transport en commun dont les chauffeurs manoeuvrent leurs engins au mépris de la personne humaine.

De temps en temps une rencontre se fait à l’improviste, et l’on découvre avec joie qu’une connaissance que l’on croyait morte est encore en vie. Rencontres bruyantes ponctuées d’embrassades, d’accolades et d’échanges d’informations relatives aux nouvelles de parents ou d’amis vivants ou morts, sur l’augmentation de prix des produits de première nécessité, sur l’augmentation déjà dramatique du taux de chomage inhérent au système.

Nous sommes à une quinzaine de jours du terrible séisme qui a ravagé Port-au-Prince, la capitale du pays et ses environs ainsi que plusieurs autres villes au sud du pays. Chiffres avancés par les autorités 175 000 morts et 20 000 disparus, des milliers de blessés et d’estropiés. Sur fond de guerre de basse intensité ponctué par plus de 20 ans de politique néo-libérale et par plus d’une vingtaine de massacres depuis le 7 février 1986, la population haïtienne dont la revendication fondamentale est de “changer l’État”, se voit encore en train de compter d’autres morts, d’autres blessés, d’autres disparus. Comme toujours, s’agissant de responsabilités, l’État néocolonial –grand modèle pour l’Afrique des années 50–60– a brillé et brille encore par sa politique de trahison nationale; a peine quelques déclarations pour la forme, pour continuer à leurrer un peuple en plein désarroi et l’empêcher de prendre des initiatives. Aucun encouragement venant des autorités n’a été constaté en vue de former des comités dans les différents quartiers et qui permettrait la gestion rationnelle des espaces sinistrés.

Et déjà, la radio annonce l’arrivée de l’aide internationale, particulièrement celle des américains, 20.000 soldats lourdement armés gérés par Obama-Clinton-Buch, ne correspondant pas à une aide humanitaire. L’aéroport international Toussaint Louverture est bouclé, et un avion français d’aide est empêché d’atterir dans l’espace; rapide visite de Mme Clinton à son complice autochtone. Des rumeurs tourbillonnent et s’entrechoquent: assistanat, bénévolat, promesses d’aide, mobilisation d’artistes d’Hollywood, opportunité de la reconstruction, amour déclaré pour Haïti comme toujours, possible réunion d’investisseurs à Lagos, utilisation d’armes électromagnétiques par l’armée américaine sur Haïti, ayant provoqué le séisme, besoin des autorités de se débarrasser des sinistrés en les refoulant dans les provinces sans aucune préparation ou planification, créer une dynamique de trois jours de jeûne pour apaiser une prétendue colère de Dieu…

Entretemps et comme toujours on constate une “mauvaise” coordination dans la distribution de nourriture car, l’aide utilisée comme arme alimentaire tarde à venir, forçant la population a n’avoir qu’une seule préoccupation, la quête de la nourriture et l’empêchant de se révolter et de réclamer ses droits.

Raynal Trouillot
Morne Lazarre Pétion-ville/Haïti

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