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D’Istanbul à Thessalonique: Occupation, Autogestion, Production

category grèce / turquie / chypre | luttes en milieu de travail | nouvelles author Friday November 15, 2013 14:44author by Özlem Arkun - DAF (Revolutionary Anarchist Action)- Meydan Gazetesi Report this post to the editors

Ils et elles sont les travailleurs et travailleuses de Kazova, résistant depuis le 31 janvier et maintenant, produisant tout en résistant. Ils et elles sont ceux et celles qui tentent de changer le monde et leur vie, qui a totalement changé depuis qu’ils et elles ont été mis en congé pour une semaine le 31 janvier.
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KAZOVA : LA LIBERTÉ SE TISSE MAILLE PAR MAILLE


« … Ils et elles sont ceux et celles qui créent à partir de rien, ils et elles sont les travailleurs et travailleuses de Kazova, ils et elles sont de vraies divinités. Ils et elles nous ont enseigné la résistance maille par maille ».
– Un travailleur sous-contractuel de la municipalité de Beşiktaş, Rıdvan Çalışkan.

Ils et elles sont les travailleurs et travailleuses de Kazova, résistant depuis le 31 janvier et maintenant, produisant tout en résistant. Ils et elles sont ceux et celles qui tentent de changer le monde et leur vie, qui a totalement changé depuis qu’ils et elles ont été mis en congé pour une semaine le 31 janvier.

Ils et elles se sont fait dire qu’ils et elles allaient se faire voler leurs salaires impayés et leurs heures supplémentaires lors de leur retour de congé. Toutefois, lors du retour au travail, l’avocat de la compagnie les attendait dans l’usine. Les patrons Ümit Somuncu et Umut Somuncu étaient partis en douce depuis longtemps, emportant 100 000 chandails, 40 tonnes de fil et toutes les machines dispendieuses mais légères. Ils ont arraché les moteurs et les fiches des machines qu’ils ne pouvaient emporter avec eux et ont inversé les circuits, rendant les machines inutilisables. Durant la semaine de congé, 3 jours d’absence consécutifs furent inscrits dans les rapports officiels pour tous les travailleurs et toutes les travailleuses et tous et toutes furent licencié-e-s sans compensation. Les travailleurs et travailleuses de Kazova firent face à un dilemme ce jour là. Ils et elles retournèrent à la maison. Toutefois, ce n’était pas la fin, mais un nouveau départ dans la vie de chacun d’eux et chacune d’elles.

« Nous ne sommes plus comme nous étions le 31 janvier. Le 31 janvier, nous étions désespéré-e-s, inconscients, inconscientes, ignorantes et ignorants. Ainsi, nous ne faisions confiance à personne et nous étions effrayé-e-s. Donc, nous étions opprimé-e-s. Mais maintenant, nous avons appris et nous continuons d’apprendre. Notre enseignante est la résistance. La résistance nous a enseigné et nous enseigne encore », affirme Bülent Ünal, travailleur de l’usine Kazova. Il ajoute : « Au départ, nous étions timides et gêné-e-s. Nous ne pouvions scander de slogans, nous ne pouvions tenir de bannières. Nous avons appris. Nous nous rassemblions sur la Place Şişli toutes les semaines et nous marchions à l’usine. Mais, par cette action, nous ne parvenions pas à faire entendre nos voix. Nous avons appris que certains biens avaient été volés de l’usine alors que nous faisions encore des marches les mercredis. Cette fois-ci, les voleurs étaient les gestionnaires de l’usine. Le 28 avril, nous avons monté nos tentes devant l’usine. Depuis lors, notre résistance est devenue une tente de résistance ».

Après avoir monté leurs tentes de résistance en avril, ils et elles ont empêché les machines, le fil et les chandails de se faire voler. Pendant ce temps, les patrons ont été au bureau du Procureur pour porter plainte contre les travailleurs et travailleuses de Kazova pour un prétendu vol. Par la suite, les cassettes des caméras de sécurité des usines proches furent aussi examinées et il fut révélé que les voleurs étaient bel et bien les propres hommes des patrons. Néanmoins, aucune accusation ne fut portée envers ces hommes, mais des enquêtes furent menées sur les travailleurs et travailleuses.

Malgré cela, ils et elles ne lâchèrent pas, firent davantage d’actions, joignirent des actions de solidarité avec d’autres travailleurs et travailleuses licencié-e-s, reçurent des coups de matraque, s’étouffèrent avec les gaz des policiers et continuèrent de résister.

Et ils et elles décidèrent de se préparer pour saisir les machines inutiles de l’usine pour leurs salaires impayés. Le 30 janvier, ils et elles occupèrent l’usine et saisirent les machines et les biens à l’intérieur. Ils et elles reprirent ce que les patrons leur avaient volé, ce qui était déjà à eux et elles.

Quand ils et elles tentèrent de s’emparer d’une partie des sommes qui leur étaient dues en vendant ces machines, la police les en empêcha et envoya 4 personnes en détention. Par la suite, 8 travailleurs et travailleuses se sont enfermé-e-s dans l’usine et ont commencé une grève de la faim. En parlant de cette période, Bülent Ünal, l’un des travailleurs, a ainsi décrit la situation : « les patrons volant notre travail et emportant les machines n’était pas un crime, mais nous qui tentions d’avoir une fraction des sommes qui nous étaient dues en était un. […] La police est venue à l’usine à la demande des patrons Ümit Somuncu et Umut Somuncu. Une fois de plus, nous avons été accusé-e-s. Personne n’a dit quoique ce soit aux patrons ».

Tout en poursuivant la grève de la faim, ils et elles ont continué à faire croître la résistance. Ils et elles étaient en solidarité avec d’autres résistances. Ils et elles ont appris la solidarité dans la résistance.

Yaşar Gülay, un des travailleurs de l’usine Kazova, en parlant des difficultés auxquelles ils et elles ont fait face durant cette période, ajoute : « nous savons tout autant que nous allons devoir faire face à encore plus de problèmes. Problèmes économiques, police, nous allons faire face à un tas de problèmes. Mais nous pensons que nous pouvons résoudre chacun d’eux. Parce que nous ne sommes pas seul-e-s. Parce que nous avons changé les revendications de notre résistance. Nos revendications ne sont pas limitées aux sommes qui nous sont dues. Il s’agit d’une résistance d’honneur. Il s’agit d’un petit exemple de la guerre entre l’establishment et le peuple. Et nous sommes ensemble avec notre peuple dans cette guerre. Nous ne sommes pas seul-e-s et nous ne le serons pas ».

Les travailleurs et travailleuses de Kazova ont redémarré les machines avec lesquelles ils et elles produisaient depuis des années, pour la première fois, pour eux et elles-mêmes, le 31 août. Et depuis, ils et elles produisent pour eux et elles-mêmes. D’un côté, ils et elles poursuivent leur résistance sur le devant de l’usine. De l’autre, ils et elles tissent leurs chandails avec le feu de leur résistance.

Quand ils et elles ont occupé l’usine, ils et elles ont commencé par compléter les chandails à moitié produits. Avec les sommes obtenues en vendant ceux-ci dans les forums, ils et elles ont réparé les machines que les patrons avaient volontairement cassé. Ils et elles ont rendu fonctionnelles 3 machines à tisser et continuent de produire. Dans les mots de Bülent Ünal : « maintenant nous produisons nous-mêmes sur ces machines. Nous produisons sans patron au-dessus de nous. Nous allons effectivement continuer de produire. Nous ne voulons plus d’un patron au-dessus de nous qui vole notre travail. Maintenant, nous posséderons notre propre travail ».

Ils et elles sont déterminé-e-s à ne pas laisser passer les patrons parasites et kleptomanes. Maintenant, ils et elles sont en lutte non pas pour le salaire et les compensations, mais pour leur futur. Ils et elles veulent les machines que les patrons leur ont volé, et leur poursuite contre les patrons est encore devant les tribunaux. Si elles et ils gagnent leur cause, ils et elles planifient prendre les machines et continuer de produire librement dans leurs propres ateliers de travail.

Alors qu’ils et elles arpentent le chemin de la coopérativisation étape par étape, faisant fonctionner leurs machines avec le pouvoir de produire en résistant et de résister en produisant, sachant qu’ils et elles ne sont pas seul-e-s, avec le pouvoir d’être organisé-e-s. Ils et elles font fonctionner leurs machines pour le pain, la justice et la liberté. Et ils et elles tissent maille par maille un monde sans patron avec leurs chandails.

VIO. ME.: RÉSISTER EN TISSANT LA SOLIDARITÉ

« Autant ceux et celles qui pétrissent le pain, et sont sans pain, c’est nous;
Autant ceux et celles qui extraient le charbon, et gèlent au frète, c’est nous;
Nous sommes ceux et celles qui n’ont rien, mais qui prendrons le monde dans leurs mains.
»
– Tasos Livaditis

Ces lignes proviennent d’une déclaration faite par les travailleurs et travailleuses de Vio.Me. qui ont occupé leur usine en février dernier et qui ont redémarré leurs machines pour eux et elles-mêmes. Sur les côtes autour de la mer Égée, les occupations ont commencé dans des langues différentes, mais avec les mêmes sentiments. Pour le pain, pour la justice, pour la liberté…

En mai 2011, après que les patrons aient disparu avec la chute des taux de profit de la compagnie en raison de la crise économique, les travailleurs et travailleuses de Vio.Me. ont commencé leur vigile devant l’usine. Les travailleurs et travailleuses qui ne recevaient pas leur salaire et compensations alors qu’ils et elles travaillaient ne pouvaient pas obtenir leur chômage parce que les patrons avaient disparu sans fermer formellement l’usine. Toutefois, les produits (pour 400 000 euros de valeur) étaient toujours dans l’usine et cette vigile était leur seule protection contre le vol. Alors ils et elles n’ont pas fait confiance à la Filkeram Johnson Union qui affirmait que les sommes qui leur étaient dues leur seraient versées quand ils et elles mettraient fin à leur vigile devant l’usine. À la place, ils et elles ont eu confiance en eux et elles-mêmes et leur organisation, et leur vigile a continué pour des mois.

Ils et elles ont commencé à résister de cette façon et dans les rencontres réalisées, ils et elles ont décidé de refaire fonctionner l’usine sous forme de coopérative. Et ils et elles ont tout préparé, étape par étape; quand ils et elles n’avaient rien, de prendre tout de leurs mains…

Producteurs et productrice de matériaux de construction, les travailleurs et travailleuses de l’usine Vio.Me. ont épargné sur leurs allocations de chômage et ont appelé les travailleurs, travailleuses, chômeurs et chômeuses à la solidarité pour acheter les dispendieux matériaux bruts nécessaires pour redémarrer la production.

Parallèlement, ils et elles devaient légaliser la coopérative puisque la législation de l’État ne laissait pas les travailleurs et travailleuses partir une coopérative d’eux et elles-mêmes. Et la seule façon de faire cela fut de se rassembler, d’accroître la solidarité et de s’organiser.

Les travailleurs et travailleuses de Vio.Me. ont participé à de nombreuses résistances et conférences. Ils et elles ont parlé de leur lutte partout où ils et elles ont été. Ils et elles ont tissé la résistance de concert avec plusieurs groupes, syndicats et individus solidaires. À Thessalonique et Athènes, des Initiatives de Solidarité avec Vio.Me. se sont créées. Et un convoi, passant par Volos et Patras, fut réalisé en Grèce. Ce convoi préparé pour la solidarité avec les travailleurs et travailleuses de Vio.Me. fut joint par des personnes de partout en Grèce, et des milliers de personnes ont marché en direction du Ministère du Travail en compagnie des travailleurs et travailleuses de Vio.Me. qui présentaient le projet de coopérative qu’ils et elles avaient préparé si méticuleusement dans leurs réunions dont le processus décisionnel reposait sur la démocratie directe. Après les rencontres, les travailleurs et travailleuses se firent annoncer que la réponse prendrait deux semaines. Ainsi, ils et elles sont retourné-e-s à Thessalonique.

Mais le ministère n’a jamais répondu. Et ils et elles ont déclaré que l’occupation de l’usine continuerait encore, tout comme depuis le début, en s’appuyant sur eux et elles-mêmes et leur pouvoir organisé. Le 12 février 2013, ils et elles ont occupé l’usine avec tous ceux et toutes celles qui étaient venu-e-s en solidarité et ont démarré les machines de l’autogestion. Ils et elles ont aussi redémarré les machines qu’ils et elles avaient fait fonctionner durant des années pour les patrons, pour la première fois, pour eux et elles-mêmes. Et aujourd’hui, ils et elles les font encore fonctionner.

Les travailleurs et travailleuses ont fait face à différentes pressions et blocages de l’État durant leur résistance et, à ce jour, ils et elles sont confronté-e-s à la pression de l’État au sujet des factures d’électricité que les patrons n’ont pas payé. En dépit de tout, les travailleurs et travailleuses de Vio.Me., et tous ceux et toutes celles qui sont solidaires avec eux et elles, continuent de résister.

Et ils et elles savent que leur lutte est d’une importance capitale, non seulement parce qu’elle questionne la position parasitaire des patrons, mais aussi parce qu’elle apporte la solution la plus réaliste aux fermetures d’usines et au chômage étant donné que « la méthode de lutte est la méthode pour créer un monde sans patron, c’est-à-dire que les travailleurs et travailleuses s’emparent des moyens de production ».

Puis, ils et elles savent que : « la lutte d’un seul syndicat n’est pas suffisante pour libérer le peuple des chaînes du capitalisme et mettre fin à cette crise. La lutte de ce syndicat devrait être la lutte de tous les travailleurs, de toutes les travailleuses et de tous les syndicats ouvriers ».

Les travailleurs et travailleuses de Vio.Me. continuent de résister depuis 2011, tissant la solidarité, portant leur lutte, et depuis le mois de février dernier, résistant en produisant. De partout dans le monde, de l’Argentine, du Chili, du Mexique, d’Allemagne, de Serbie, de Turquie, d’Égypte, leurs camarades saluent leur lutte. Ils et elles savent qu’ils et elles ne sont pas seul-e-s. Ils et elles continuent de produire, de résister et savent que : « les travailleurs et travailleuses de Viomihaniki Metalleutiki ne peuvent changer le monde par eux et elles-mêmes. Mais si elles et ils sont abandonné-e-s à leur sort, rien ne changera. Cette lutte est la lutte de tous les travailleurs, travailleuses et sans-emplois. C’est la lutte pour tous et toutes. Nous allons la gagner! ».

CRÉER LA RÉALITÉ DE DEMAIN

Alors qu’autant les travailleurs et travailleuses de l’usine Kazova que ceux et celles de Vio.Me. marchent sur le même chemin de l’autogestion à la coopérativisation, la réalité de demain prend forme sous nos yeux. Comme Bakounine l’a dit, ils et elles « ne créent pas seulement des idées, mais la réalité du futur ». En occupant, en résistant et en produisant, ils et elles construisent des rapports sans exploitation ici et maintenant, en commençant aujourd’hui, étape par étape, avec endurance, maille par maille, ils et elles créent un monde sans patron.

De l’autre côté, ces travailleurs et travailleuses en autogestion détruisent les fondements de, non seulement les rapports sociaux au sein des usines, mais aussi de tous les rapports de dominants-dominés, d’exploiteurs-exploités. Rejetant les conventions de la société et créant des fissures dans les rapports de domination et d’hiérarchie qui étaient véhiculés comme indispensables. À partir d’aujourd’hui, créant le modèle d’une autre société, une société émancipatrice qui prend ses propres décisions et produit des solutions pratiques aux problèmes.

Ils et elles, les travailleurs et travailleuses sans patron, sont en train de planter les graines de la liberté dans les fissures qu’ils et elles ont ouvert dans le capitalisme, les font croître avec la fertilité de la solidarité, la lumière de l’autogestion et les font verdir en réalisant leurs rêves ensemble. Alors que ces graines, poussant dans les craques du capitalisme, enfoncent leurs racines de plus en plus profondément, les travailleurs et travailleuses attaquent ce système d’exploitation et créent un monde nouveau sans patron dès aujourd’hui.

Özlem Arkun

Vous pouvez retrouver la version originale de ce texte dans le journal Meydan Gazetesi.

* Traduction du Blogue du Collectif Emma Goldman (Saguenay) - http://ucl-saguenay.blogspot.ca/

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