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6. L’organisation et la force sociale

category brésil/guyane/suriname/guinée française | mouvement anarchiste | déclaration de principes author Monday August 06, 2012 20:11author by FARJ - FARJ Report this post to the editors
Anarchisme social et organisation Traduction française

6. L’organisation et la force sociale

L’organisation et la force sociale
[...] Dix, vingt ou trente hommes, qui s'entendent bien,
qui son bien organisés, qui savent
où ils vont, peuvent entrainer facilement
cent, deux cents ou même plus.
Mikhaïl Bakounine

Auparavant, nous avons traité de ce que nous considérons comme l'organisation du capitalisme et l'État, en cherchant à déterminer "où nous en sommes», et l'organisation du socialisme libertaire, en essayant de préciser "ce que nous voulons atteindre". Pour compléter la discussion sur l'organisation, il sera nécessaire de nous étendre un peu sur les mouvements sociaux et l'organisation populaire, ainsi que sur l'organisation spécifique anarchiste; deux différents niveaux d'action qui visent à répondre à [la question], « comment pensons-nous pouvoir partir de là où nous en sommes et arriver au point que nous voulons atteindre", approfondissant les éléments indispensables à notre stratégie permanente. Comme Malatesta l’a bien résumé, «[...] l'organisation en général, comme principe et condition de la vie sociale, aujourd'hui, et dans la société future; l'organisation du parti anarchiste et des forces populaires» [82].
Pour nous, la transformation sociale que nous voulons voir se réaliser passe, nécessairement, par la construction de l'organisation populaire, grâce à l'accroissement progressif de sa force sociale jusqu'au moment où il sera possible de renverser le capitalisme et l'État, avec la révolution sociale et ouvrir la voie vers le socialisme libertaire. En outre, nous soutenons que l'organisation populaire doit être accompagnée par un développement parallèle de l'organisation spécifique anarchiste, qui devrait l'influencer, en lui donnant le caractère désiré. Par la suite, nous aurons d'autres discussions sur chacun de ces sujets et sur l'interaction entre les uns des autres. À l'heure actuelle, ce qui est essentiel pour nous est de supposer qu'il n'est pas possible de penser à cette transformation nécessaire, sans organisation et sans croissance progressive de la force sociale.
Nous considérons la société d'aujourd'hui comme le résultat d'un rapport de forces, ou même d’un conflit permanent - qui prend la forme de lutte des classes - entre le capitalisme, l'État et d'autres forces politiques diverses, et que les premiers sont en position de force, c’est à dire qu’ils arrivent à avoir une plus grande force sociale que les secondes, par conséquent, à établir leur pouvoir. Dans ce sens le capitalisme et l'État oppriment les autres forces politiques qui leur résistent.
Cette résistance peut se produire de différentes façons, certaines constituant de plus ou moins grandes forces politiques, et d'autres ne constituant pas de forces politiques. "La Résistance peut être passive (lorsque l'agent n'agit pas contre la puissance qui la réprime) ou active (lorsque le pouvoir est sujet à des représailles de la part de celles et ceux qu’il asservit); isolé (il a un caractère individuel) ou articulé (la force collective)" [83]. La résistance passive ne constitue pas une force politique et la résistance isolée possède peu de force sociale. Par conséquent, afin d'atteindre nos objectifs, nous préconisons une résistance active et articulée qui cherche dans l'organisation l'accroissement permanent de la force sociale. Pour la construction de cette résistance, il est nécessaire de faire front avec ceux qui sont en accord avec notre proposition pour la transformation sociale.
Si nous voulons aller de l'avant, si nous voulons faire quelque chose de plus que ce qui isole en permanence chacun de nous, nous devons savoir avec quels camarades en particulier nous pouvons être d'accord, et avec lequels nous sommes en désaccord. Cela est particulièrement nécessaire lorsque l'on parle d'action, de mouvement, des méthodes avec lesquelles il est nécessaire de travailler à beaucoup de mains pour être en mesure d'obtenir des résultats qui vont dans notre sens [84].
Ce que nous pouvons appeler aujourd'hui «ordre» ou statu quo est l'organisation du capitalisme et de l'état, qui peut ou ne peut pas prendre en considération d'autres forces politiques qui constituent une menace. Etre désorganisé, mal organisé ou isolé signifie ne pas constituer une résistance suffisante au capitalisme et à l'Etat et, par conséquent, ne pas parvenir à augmenter de manière significative la force sociale de l'organisation qui doit avoir comme objectif de les remplacer par le socialisme libertaire. Nous pouvons dire que «celui qui ne s'organise pas, qui ne cherche pas la coopération des autres et ne leur offre pas des conditions de réciprocité et de solidarité, se met nécessairement dans un état d'infériorité et reste un engrenage inconscient dans la mécanisme social que d'autres font fonctionner à leur manière, et à leur avantage "[85]. Désorganisation, mauvaise organisation et isolement, en effet, finissent par soutenir le capitalisme et l'Etat - car elles ne permettent pas la construction de la force sociale nécessaire. En ne prenant pas partie, d'une manière appropriée, dans le rapport de force ou le conflit permanent de la société vous finissez par reproduire «l'ordre». Ainsi, «si nous ne cherchons pas l'organisation et l’association bien articulées, nous finirons par ne pas réussir à exercer une influence dans les luttes, et par conséquent dans la société d'aujourd'hui» [86]. Ainsi,
ceux qui n'ont pas les moyens ou la conscience suffisamment développée pour s'organiser librement avec ceux avec qui ils ont des intérêts et des sentiments en commun, souffrent de l'organisation construite par d'autres personnes, généralement constitués en une classe dirigeante ou un groupe en vue d'exploiter, pour leur propre bénéfice , le travail d'autrui. Et l'oppression séculaire des masses par un petit nombre de privilégiés a toujours été la conséquence de l'incapacité de la plupart des individus à se mettre d'accord et de s'organiser avec d'autres travailleurs pour la production la jouissance et la défense éventuelle contre ceux qui veulent les exploiter et les opprimer. [...] Rester isolé, chacun agissant ou souhaitant agir seul, sans entente avec les autres, sans préparation, sans unir les faibles forces des individus dans un groupe puissant, c'est se condamner à l'impuissance, gaspiller sa propre énergie sur de petits actes sans efficacité et perdre rapidement la foi dans l'objectif et tomber dans l'inaction complète [87].
La désorganisation et la mauvaise organisation se reproduisent sur le plan social – celui des mouvements sociaux, dans lequel on doit construire et développer l'organisation populaire - avec pour conséquence la difficulté d'accumuler une force sociale, rendant la spontanéité naturelle de ce plan incapable d'effectuer toutes les transformations sociales souhaitées. Sur le plan politique – celui de de l'anarchisme, dans lequel on devrait mettre au point l'organisation spécifique anarchiste – cela conduit à la difficulté d'influer sur le plan social pour qu’il développe des méthodes et moyens adéquats. L'isolement et l'individualisme ont pour conséquence que ni le plan politique ni le plan social ne prennent la forme souhaitée, en n’articulant ni l'organisation populaire, ni l’organisation anarchiste. Outre cette désorganisation, une mauvaise organisation et l'isolement sont des facteurs entravant la mise en place du socialisme libertaire, comme nous croyons qu'il ne peut être construit qu'avec beaucoup d'organisation.
L’organisation signifie la coordination des forces, ou «l’association avec un objectif commun et avec les voies et moyens nécessaires pour atteindre cet objectif» [88]. De cette façon, nous devons penser à des méthodes et des moyens pour l'organisation populaire lui permettant de renverser le capitalisme et l'État, et, par le biais de la révolution sociale construire le socialisme libertaire - son objectif. Dans le même temps, nous devons penser à des méthodes et des moyens pour l'organisation spécifique anarchiste, lui permettant de créer l'organisation populaire et de l'influencer, en lui donnant le caractère souhaité et en arrivant au socialisme libertaire par le biais de la révolution sociale - son objectif. Ensuite, nous discuterons plus en détail de ces deux plans d'organisation. Tout d'abord, nous discuterons du plan social, dans lequel les mouvements sociaux fonctionnent et dans lequel nous devons chercher à construire l'organisation populaire. Ensuite, du plan politique et du développement de l'organisation anarchiste spécifique.
Quand on parle de force sociale, il est important pour nous de définir ce que nous entendons par ce terme. Nous croyons que chaque individu, en tant qu'agent social, possède naturellement une force sociale qui est l'énergie qui peut être appliquée dans le but d'atteindre leurs objectifs. Cette force varie d'une personne à l'autre, et même pour chaque personne sur une période de temps donnée. Pour atteindre leurs objectifs, les individus font souvent recours à des instruments qui peuvent accroître leur force sociale. Beaucoup de choses peuvent être utilisés pour augmenter la force sociale, tels que: des armes, des informations, la formation, les techniques adéquates, l'optimisation des ressources, la persuasion, les machines, etc Toutefois, l'instrument le plus important pour cela est l’organisation ; qui peut être mise en place d'une manière autoritaire, par le biais de la domination, ou d'une manière libertaire, par le biais de l'association libre.
Dans une organisation autoritaire la force sociale des divers agents (par exemple dans l'état avec une armée, ou dans une entreprise avec le travail salarié) est aliéné, et les met dans une position de dominé par rapport à l'organisation (dans ces cas, l'État et le patron), les obligeant à contribuer à un objectif étranger, différent du leur. C'est exactement la façon dont la force sociale du système actuel est aujourd'hui constituée, c’est à dire, par le biais de l'aliénation de divers agents qui contribuent aux objectifs du capitalisme, qui ne sont pas les mêmes que les leurs. Dans une organisation libertaire, c’est la libre association ou l'organisation anti-autoritaire, qui produit l'accroissement de la force sociale – celle-ci étant toujours associée à d'autres instruments.
L’Organisation qui prend la forme de l'association libre est indispensable à notre projet de transformation sociale parce que, quand les individus travaillent ensemble, leur force sociale n'est pas simplement la somme des forces individuelles, mais beaucoup plus que cela. Nous utiliserons l'exemple de Proudhon pour expliquer l'affaire. "Deux cents travailleurs ont mis en place l'obélisque de Louqsor en quelques heures; croyez-vous qu'un seul homme ait pu accomplir la même tâche en deux cents jours? [89]. Certainement pas, parce qu'il ya une «force immense qui résulte de l'union et l'harmonie des travailleurs, de la convergence et du concours de leurs efforts» [90]. Dans l'exemple ci-dessus l'organisation des travailleurs leur a donné une force collective, permettant un plus résultat que la simple somme des résultats individuels. Ainsi, nous pouvons conclure que, pour être en mesure de mener à bien notre projet de transformation sociale l’association est fondamentale, car c'est par elle, et seulement à travers elle, que nous serons en mesure d'accumuler de la force sociale nécessaire pour renverser le capitalisme et l'État.
Toutefois, pour le gain permanent indispensable en force sociale qui doit se produire dans une forme anti-autoritaire de l'organisation, tant sur le plan de l'organisation populaire que sur le plan de l'organisation anarchiste, nous considérons comme fondamentale
[...] Une certaine discipline, pas automatique, mais volontaire et réfléchie, étant pleinement en accord avec la liberté des individus, a été et sera nécessaire chaque fois que de nombreuses personnes, librement unis, entreprennent un travail collectif ou une action. Cette discipline n'est rien de plus que l'accord volontaire et réfléchi de tous les efforts individuels vers un but commun. Au moment de l'action, au milieu de la lutte, les rôles se divisent naturellement en fonction des aptitudes de chacun, appréciées et jugées par le collectif entier: certains dirigent et ordonnent, d'autres exécutent les ordres. Mais aucune de ces fonctions n’est figée, ni fixée, ni irrévocablement liée à quelque personne que ce soit. Les niveaux et la promotion hiérarchique n'existent pas, de telle sorte que le commandant d'hier peut être le subordonné d'aujourd'hui. Personne ne s'élève au-dessus des autres, ou, s'il s'élève, ce n’est que pour retomber dans l'instant suivant, comme des vagues dans la mer, revenant toujours au niveau sain de l'égalité [91].
Évidemment, cette discipline ne doit pas «suivre le modèle autoritaire, à la fois dans l'oppression des membres [...] ainsi que par l'intermédiaire [de] charges, qui [...] devraient également prendre en compte le respect et l'éthique. [...] C’est une grande préoccupation pour nous de différencier l'auto-discipline que nous promouvons ici, de la discipline militaire, l'exploitation et d'oppression, en substance, et qui, de notre point de vue, n’emprunte pas différents chemins menant à d'autres autoritarismes que nous connaissons bien »[92]. Afin de différencier la discipline souvent prêchée par les autoritaires de la discipline que nous défendons, nous choisissons d'utiliser le terme d'auto-discipline, affirmant que "l'auto-discipline est le moteur de l'organisation autogérée» [93], celle-ci étant pour nous, avec l'engagement et la responsabilité, indispensable à la construction d'une organisation anti-autoritaire, qui vise à augmenter sa force sociale. Cette auto-discipline, à notre avis, se situe moins dans l'organisation populaire et plus dans l'organisation spécifique anarchiste, tout en variant selon le contexte. Dans les périodes de turbulence sociale plus grande la nécessité e l'autodiscipline augmente. En période de reflux, elle peut être plus petite.
Pour nous, comme nous l'avons souligné, l'objectif de l'organisation populaire comme forme de résistance active et articulée est, augmentant progressivement sa force sociale », de renverser le capitalisme et l'État et, par le biais de la révolution sociale, de construire le socialisme libertaire ". Cette augmentation de la force sociale peut être réalisée avec divers instruments, mais surtout l'organisation des classes exploitées avec le plus grand nombre de personnes possible et un bon niveau d'organisation - ce qui implique nécessairement l'auto-discipline, l'engagement et la responsabilité. En outre, comme nous l'avons également déjà défini, l'objectif de l'organisation spécifique anarchiste est de «construire l'organisation populaire et de l'influencer, en lui donnant le caractère désiré, et d'arriver au socialisme libertaire par le biais de la révolution sociale". Pour cela l’organisation spécifique doit se constituer en une organisation de la minorité anarchiste active avec un niveau élevé d'auto-discipline, d'engagement et de responsabilité. Conçue de cette manière, "l'organisation, loin de créer l'autorité, est le seul remède contre elle et le seul moyen par lequel chacun de nous s'habitue à prendre une part active et consciente dans le travail collectif» [94].
Notes:
82. Errico Malatesta. "Un, je Organização". Dans: Ecrits Revolucionários. São Paulo, Imaginário, 2000, p. 49. Pour Malatesta le parti anarchiste est la même chose que l'organisation spécifique anarchiste.
83. Fabio López López. Poder e Dominio: uma Visão Anarquista, p. 75.
84. Luigi Fabbri. "Un Anarquista Organização". Dans: anarcho-Comunismo Italiano. São Paulo, Luta Libertaria, s / d, p. 109.
85. Errico Malatesta. "Un Organização das Massas Operárias Contra o Governo e os Patrões". Dans: Ecrits Revolucionários, p. 39.
86. Farj. "Un um é Propriedade Roubo". Dans: Protesta! 4, p. 7.
87. Errico Malatesta. "La Organización". Extrait de l'e Pensiero Volontà, 16 mai, 1925. Dans: Vernon Richards. Op. Cit. pp 83-85.
88. Idem. "Un, je Organização". Dans: Ecrits Revolucionários, p. 51.
89. Pierre-Joseph Proudhon. "1ere. Mémoire sur la propriété». Dans: Une Nouvelle Sociedade, p. 35.
90. Ibid.
91. Bakounine. "Táctica e Disciplina faire Partido Revolucionario». Dans: Conceito de Liberdade, pp 198-199.
92. Farj. "Sobre o Reflexões Comprometimento, un Responsabilidade ea Autodisciplina".
93. Ibid.
94. Errico Malatesta. "A II Organização". Dans: Ecrits Revolucionários, p. 59.


Sommaire

0. Préface du Traducteur

1. Introduction

2. L'anarchisme social, la lutte des classes et les relations Centre-Périphérie

3. L'anarchisme au Brésil: la perte et la tentative de récupération du vecteur social

4. La société de domination et d'exploitation: le capitalisme et l'Etat

5. Les objectifs finaux: la révolution sociale et socialisme libertaire

6. L’organisation et la force sociale

7. Les mouvements sociaux et l'organisation populaire

8. L'organisation spécifique anarchiste

9. L'organisation spécifique anarchiste: la pratique et l'insertion sociale

10. L'organisation spécifique anarchiste: production et reproduction de la théorie

11. L'organisation spécifique anarchiste: la propagande anarchiste

12. L'organisation spécifique anarchiste spécifique: formation politique, relations et gestion des ressources

13. L'organisation spécifique anarchiste: rapports entre L'organisation spécifique anarchiste et les mouvements sociaux

14. L'organisation Spécifique Anarchiste: La nécessité de la stratégie, de la tactique et du programme

15. L'Especifismo: L'organisation anarchiste, perspectives et influences historiques

16. Notes et conclusion

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