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Le massacre des kurdes de Şırnak : La Terreur de l’État turc en action

category grèce / turquie / chypre | impérialisme / guerre | opinion / analyse author Wednesday January 04, 2012 04:09author by by José Antonio Gutiérrez D. Report this post to the editors

Ce carnage injustifiable a une fois de plus exposé la vraie face du terrorisme d’État en Turquie. Ce massacre expose l’hypocrisie d’Erdogan, dont le régime a les mains tachées du sang Kurde alors qu’il parle cyniquement des droits humains dans d’autres pays. Mais, cela met également en évidence l’hypocrisie d’une « communauté internationale » qui est choquée par la répression en Syrie, tout en assistant silencieusement au massacre du peuple Kurde. [English] [Castellano] [العربية]
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Le massacre des kurdes de Şırnak : La Terreur de l’État turc en action

Le gouvernement du Parti AKP (Adalet ve Kalkinma Partisi, Parti de la Justice et du Développement) au pouvoir en Turquie s’est démené dans les dernières années pour promouvoir sur la scène internationale l’image d’un gouvernement presque « progressiste », soutenant verbalement la cause Palestinienne et condamnant en les termes les plus forts la répression en Syrie. Ceci faisait partie de sa tentative de gagner une position pour la Turquie comme puissance régionale dans le Moyen-Orient, tentant de surmonter la réticence de ses voisins arabes envers elle depuis l’époque de l’Empire Ottoman.

Quand la Turquie a perdu, aux yeux de l’OTAN, la position stratégique qu’elle occupait à la fin de la Guerre Froide, elle a tenté de se tailler une position d’influence dans une région tourmentée par l’instabilité politique. D’un côté, la Turquie a continué de cultiver ses liens avec les États-Unis à travers l’OTAN (tel que démontré par le rôle central du régime d’Ankara dans les négociations de la « transition » en Libye), mais au même moment, à grande dose de démagogie, elle tente de gagner les sympathies du monde arabe en se posant comme favorable aux rébellions pro-démocratie (tout en tentant de les canaliser dans une direction conservative) et à l’auto-détermination Palestinienne. Dans ce double jeu, la Turquie cultive une image néolibérale pour l’Ouest et une image islamique pour l’Est. Pendant ce temps, elle renforce à l’interne ses politiques militaristes et répressives, en particulier envers le peuple Kurde.

Ce n’est pas pour rien que Netanyahou [NDT. le premier ministre israélien], après les protestations du premier ministre turc, Erdogan, suite au naufrage de la flottille pour Gaza, Mavi Marmara, avait fait la remarque qu’au lieu de tant parler des palestiniens et palestiniennes, il devrait porter attention à la situation Kurde dans son propre pays. Cette déclaration de Netanyahou était sans aucun doute odieusement hypocrite. Mais Erdogan est autant hypocrite quand il fait ses joyeuses sorties pontifiant le droit de manifester et le besoin d’une plus grande démocratie dans le Moyen-Orient, se proclamant lui-même un porte-parole du « Printemps Arabe » et un combattant de la cause Palestinienne, alors qu’il opprime, persécute, emprisonne, torture et massacre sa propre minorité opprimée, les kurdes.

Les contestations dans la région kurde furent noyées dans le sang, avec des douzaines de morts, alors que le monde concentrait son attention sur la Libye et la Syrie. Quand le parti AKP a gagné les élections turques pour la première fois en 2002, c’était grâce aux promesses démagogiques de réformes et de modernisation qui, dans une certaine mesure, ont créé des tensions avec l’armée et les nationalistes turcs, les kémalistes, qui détenaient un monopole sur le pouvoir depuis la fin de la Première Guerre Mondiale, quand la République turque fut fondée sur les cendres de l’Empire Ottoman. Ces promesses de réformes et de démocratie incluaient la question Kurde. Il est vrai qu’il fut largement décriminalisé de parler la langue kurde et que la diffusion kurde à la radio et à la télévision est maintenant permise. Mais ces mesures sont, au mieux, symboliques et ne représentent que de simples concessions culturelles. Le régime n’a pas changé du tout la nature de l’oppression ou de la discrimination envers le peuple Kurde, une oppression qu’il vit tous les jours. Et avec l’échec de la stratégie du Parti AKP pour mettre fin à la loyauté des kurdes envers le mouvement pour l’autonomie en jouant la carte islamiste, celui-ci a à nouveau commencé à agiter le sabre, retournant à la traditionnelle politique turque envers les minorités ethniques : les écraser si elles refusent l’assimilation.

Aucun intérêt n’est démontré à résoudre le conflit faisant rage depuis 1984 entre l’État et les guérillas kurdes, le PKK (Partiya Karkerên Kurdistan, Parti des Travailleurs du Kurdistan), en négociant avec les demandes des insurgé-e-s : la restitution des terres et une réforme agraire, l’autonomie politique (et non l’indépendance), la démocratisation à travers des expériences de gouvernance locale participative, le démantèlement des paramilitaires armés par l’État turc (les gardes de village), la pleine égalité des kurdes avec les turcs et la reconnaissance de la nature multinationale de la Turquie, la pleine égalité des femmes, le respect des expériences de pouvoir populaire construites durant la résistance armée. La militarisation des territoires kurdes demeure la même et depuis 2007, nous avons été témoins d’une escalade des actions militaires turques envers les rebelles, avec de plus en plus de bombardements contre les camps insurgés à la frontière avec l’Irak. Depuis 2009, a commencé un processus de persécution politique systématique contre les mouvements sociaux, politiques et populaires du peuple Kurde, avec la fermeture du principal parti kurde, le DTP (Demokratik Toplum Partisi, Parti Société Démocratique) sur des accusations d’être le bras politique du PKK. Sous le parapluie de la loi « anti-terroriste », plus de 3000 représentant-e-s élu-e-s, parlementaires, maires, syndicalistes, académicien-ne-s et intellectuel-le-s, étudiant-e-s, défenseur-e-s des droits humains et gens pauvres ont été emprisonné-e-s sans aucun procès ou accusations fondées, pour l’unique crime de supporter la cause Kurde, pour le crime d’être des kurdes.

Cette chasse aux sorcières n’a pas seulement échoué à éveiller de quelconques condamnations de la soi-disant « communauté internationale », mais à la place, le Renseignement de l’Armée américaine a porté assistance au régime turc, tout en négociant une base militaire américaine en sol turc, dans lequel est maintenu une flotte de UAV Predators [NDT. des drones], qui est responsable de massacres brutaux au Yémen, au Pakistan et en Afghanistan. Les six derniers mois ont vu une augmentation des actes de guerre contre la résistance kurde qui a répondu par des coups bien ciblés contre les forces militaires turques. Cette situation a amené l’armée turque à bombarder et attaquer de façon gratuite, ses actions étant de plus en plus brutales et indiscriminées.

La nuit dernière, cette politique militaire absurde a frappé dans le sang la province kurde de Şırnak, à la frontière avec l’Irak. Un groupe de 50 fermiers fut bombardé par des chasseurs F-16 turcs à un poste frontalier. De ceux-ci, au moins 36 sont morts et 13 sont portés disparus. Les autres ont été sérieusement blessés et il est possible que le nombre de morts augmente. Selon le gouvernement, qui reconnait maintenant son erreur après avoir déclaré dans une précédente déclaration militaire qu’il s’agissait d’insurgés, les personnes attaquées seraient des contrebandiers de cigarettes. Selon d’autres versions, ils étaient de retour du travail ou transportaient du diesel pour usage personnel. Dans tous les cas, ils n’étaient pas des insurgés comme la déclaration militaire le stipulait, et qui fut plus tard rejetée, et il ne s’agissait pas non plus d’une opération militaire « chirurgicale ».

Ce carnage injustifiable a une fois de plus exposé la vraie face du terrorisme d’État en Turquie. Ce massacre expose l’hypocrisie d’Erdogan, dont le régime a les mains tachées du sang Kurde alors qu’il parle cyniquement des droits humains dans d’autres pays. Mais, cela met également en évidence l’hypocrisie d’une « communauté internationale » qui est choquée par la répression en Syrie, tout en assistant silencieusement au massacre du peuple Kurde.

Le peuple Kurde est maintenant mobilisé pour définir son projet politique de libération et pour résister aux quatre États qui l’occupe et l’opprime (la Syrie, la Turquie, l’Iran et l’Irak). Le plus mince sens de la décence et de l’humanité devrait nous inciter à montrer notre solidarité avec celui-ci. Les peuples du monde ne doivent pas permettre à Erdogan d’ouvrir à nouveau sa bouche pour pontifier sur les droits humains où que ce soit. Où que ce soit qu’il se posera comme démocrate et humain, nous nous devons de faire mention d’un seul mot qui sera pour toujours marqué d’une honte terrible, comme un rappel de l’atroce monstruosité du terrorisme d’État : Şırnak.

José Antonio Gutiérrez D.
29 décembre 2011

Traduction du Blogue du Collectif Emma Goldman

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