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Entretien avec un militant anarchiste géorgien

category asie de l'ouest | mouvement anarchiste | entrevue author Friday April 22, 2011 06:04author by Blogue du Collectif Emma Goldman - Collectif Emma Goldman (UCL-Saguenay) Report this post to the editors

Un aperçu de l'anarchisme en Géorgie

Avec le démantèlement de l’Union soviétique, de multiples petits États déclarèrent leur indépendance. La Géorgie, pays du Caucase de 4,5M d’habitant-e-s situé à la limite entre l’Europe et l’Asie, réinstaura son indépendance en 1991 et vit aujourd’hui des relations diplomatiques avec la Russie très tendues depuis la guerre en Ossétie du sud et en Abkhazie en 2008. Des militant-e-s anarchistes ont créé une section de la Confédération Révolutionnaire des Anarcho-syndicalistes de N.I. Makhno (RKAS) en 2010 dans la capitale de la Géorgie, Tbilissi. Le secrétaire local de la section a accepté de répondre à l’entretien ci-dessous.


Entretien avec un militant anarchiste géorgien

Un aperçu de l'anarchisme en Géorgie


Avec le démantèlement de l’Union soviétique, de multiples petits États déclarèrent leur indépendance. La Géorgie, pays du Caucase de 4,5M d’habitant-e-s situé à la limite entre l’Europe et l’Asie, réinstaura son indépendance en 1991 et vit aujourd’hui des relations diplomatiques avec la Russie très tendues depuis la guerre en Ossétie du sud et en Abkhazie en 2008. Des militant-e-s anarchistes ont créé une section de la Confédération Révolutionnaire des Anarcho-syndicalistes de N.I. Makhno (RKAS) en 2010 dans la capitale de la Géorgie, Tbilissi. Le secrétaire local de la section a accepté de répondre à l’entretien ci-dessous.

La Confédération Révolutionnaire des Anarcho-syndicalistes de N.I. Makhno est une organisation créée en 1994 en Ukraine qui compte maintenant des sections locales en Allemagne, en Russie, en Lettonie, en Israël, en Ukraine, en Géorgie et en Bulgarie. Fondée à l’initiative de militant-e-s de la ville de Donetsk qui ont partagé leur sentiment de la nécessité de s’organiser dans plusieurs villes, l’organisation anarchiste connue un renforcement considérable et reçue la reconnaissance comme une force du mouvement ouvrier dans les mines à partir de la grève générale des mineurs de Donetsk en août 1996. Depuis, la RKAS est apparue comme l’une des organisations du mouvement anarchiste ukrainien les plus actives et construites. Dans les dernières années, des membres de la RKAS ont créé la Confédération Générale du Travail des Anarcho-syndicalistes, en plus de l’organisation étudiante Action Directe et de plusieurs coopératives dans les oblasts de Donetsk et Kiev en Ukraine.

BCEG : Bonjour, comme il était écrit dans le livre Black Flame, l’histoire de l’anarchisme a malheureusement été trop souvent centrée autour de l’Europe de l’ouest. Ceci a amené beaucoup de personnes à penser qu’il n’y a qu’en Espagne qu’un mouvement de masse anarchiste a pu exister et à ignorer les mouvements de masse anarchistes qui se sont levés sur les autres continents. Très peu semble être écrit à propos de la Géorgie dans les ressources virtuelles anarchistes francophones et anglophones. Peux-tu retracer brièvement quelques organisations anarchistes historiques en Géorgie et leur importance?

RKAS-G : Bonjour camarade.

L’anarchisme, plus précisément le communisme libertaire, en Géorgie possède de vieilles et belles traditions. Ce thème est trop large pour répondre par une courte réponse, mais je tenterai tout de même de répondre brièvement. [NDT. Le correspondant a utilisé quelques extraits de textes pertinents pour décrire les phases importantes.]

« La diffusion des idées communistes libertaires dans le Caucase a commencé dans les années 1904-1905, simultanément à Koutaïssi [Géorgie] et Bakou [Azerbaïdjan]. Koutaïssi était à cette époque la capitale de l’ouest de la Géorgie. Les premières cellules anarchistes se sont développées dans l’usine de tabac de Piralov et l’usine d’eau minérale de Lagidze. Celles-ci formèrent le groupe « la Commune » et exproprièrent la maison d’édition d’un bourgeois local sur laquelle elles publièrent du matériel de diffusion des idées.

La révolte qui se déclencha à Moscou en 1905 trouva un écho en Géorgie. Les travailleurs et travailleuses géorgien-ne-s ont déclaré la grève générale ce qui paralysa l’industrie et les transports par chemin de fer. De plus, les stations de trains étaient sous le contrôle des insurgé-e-s. La paysannerie a supporté le mouvement qui avait lieu dans les villes. Des paysan-ne-s insurgé-e-s prirent possession de la terre de grands propriétaires terriens et créèrent des groupes d’auto-défense pour conduire une lutte armée contre les troupes gouvernementales. Toute la Géorgie était devenue couverte par l’autogestion des travailleurs et travailleuses et des paysan-ne-s : la classe laborieuse prenait sa destinée en main. Les anarchistes jouèrent un rôle actif dans ces événements. À Koutaïssi, ils et elles jouèrent un rôle important dans l’organisation de la révolte et la création de groupes d’auto-défense prolétarienne, les « Centuries rouges ». [Extrait du texte « АНАРХО-КОММУНИСТИЧЕСКОЕ РАБОЧЕЕ ДВИЖЕНИЕ В ЗАКАВКАЗЬЕ 1904-1907 гг. »]

Il est nécessaire d’apporter une mention spéciale à propos d’une commune de la région de la Gourie, dans l’ouest du pays. La commune a été créée à l’initiative de Meliton Konstantinovich Nakashidze, un prince défendant les idées communistes libertaires.

Depuis l’été 1905, il faisait la promotion des activités subversives des communistes libertaires de Koutaïssi auprès des paysan-ne-s de la région de la Gourie. Bientôt, sous l’influence des idées anarchistes parmi les habitant-e-s du village près duquel était établi le manoir du prince, une commune anarchiste fut créée. Les paysan-ne-s prirent collectivement possession de la terre et des vignobles pour les travailler et construisirent une salle de lecture, une boulangerie et d’autres bâtiments d’utilité publique. Rapidement, avec l’expansion du mouvement révolutionnaire dans la région de Tiflis, les paysan-ne-s expulsèrent les autorités rurales, et les quelques paysan-ne-s koulaks qui ne participèrent pas furent sujet-te-s au boycott. Le prince transféra la propriété de la terre à la commune et participa à la vie économique et sociale de celle-ci.

Au début de 1906, des troupes de représailles entrèrent dans la région de la Gourie, la commune fut écrasée et les bâtiments publics construits par les paysan-ne-s furent détruits. Meliton Nakashidze fut arrêté comme participant actif à la commune. Les informations concernant la suite de sa vie ne sont pas disponibles.

La même année, en 1906, fut créé un groupe communiste libertaire, « l’Internationale », à l’initiative du militant communiste libertaire reconnu, Georgi Gogelia, qui était arrivé de Suisse à Tiflis [NDT. ancien nom de la ville de Tbilissi]. Rapidement, joignirent le groupe le plus jeune frère de Georgi, Shalva Gogelia, qui était devenu l’un des leaders du groupe d’anarchistes « la Commune » à Koutaïssi, et l’un des membres de la famille du célèbre social-démocrate géorgien Michel (Mihako) Tsereteli.

« Au printemps de 1906, Gogelia et ses camarades du groupe « l’Internationale » les plus proches ont décidé de réaliser le projet de publication d’un journal anarchiste avec parution non seulement pour Moscou, mais pour toute la Russie et pour Tiflis, pour les lecteurs et lectrices géorgien-ne-s. Les premières tentatives semblèrent sans succès : le journal « Nobati » (Appel) fut fermé par la censure après sa quatorzième parution et « Hma » (La voix) est mort en silence en raison d’un manque de moyens et de l’absence d’abonné-e-s. Par la suite, le journal « Musha » (Le travailleur) (à parution journalière), qui a vécu assez longtemps pour savoir ce qui devait être écrit aux prolétaires de Tiflis, a été produit significativement plus longtemps, à l’été 1906. » [Anatoly Dubovik 2008]

Gogelia et ses camarades tinrent des chroniques d’information dans les pages du journal « Musha », notamment sur l’idée de l’organisation de syndicats et de la grève générale, et critiquèrent fermement la théorie marxiste.

« À l’été 1906, les anarchistes avaient une grande influence sur les travailleurs et travailleuses des dépôts et des ateliers de chemin de fer, de quelques petites entreprises et sur les typographes. Le « Syndicat des travailleurs anarcho-communistes de Tiflis », avec plusieurs groupes affiliés dans Tiflis et dans d’autres villes et villages de Géorgie, a été créé. Mais simultanément avec le renforcement de l’anarchisme, les forces de répression contre ce mouvement amplifièrent également – pas tant du pouvoir impérial, mais de plusieurs éléments en dehors; apparemment, des « allié-e-s de la révolution », les sociaux-démocrates.

La lutte des marxistes contre l’anarchisme a été conduite sous divers formes. La « lutte idéologique », dont le premier travail théorique de Staline «Anarchisme ou socialisme », diffusait plusieurs mauvaises conceptions sur l’anarchisme. L’abolition du pouvoir des anarchistes était ridiculisée alors même que la prise du pouvoir par un nouveau parti des marxistes n’était pas plus sérieuse. Les sociaux-démocrates, supervisant le syndicat des camelots, avaient pris la décision de boycotter la presse anarchiste; ils affirmaient que les anarchistes n’avaient pas le droit d’utiliser le mot « Travailleur » pour leur titre de journal, puisque ce ne pouvait être que le titre de journaux marxistes, - les conséquences ne furent toutefois pas fatales. Il était interdit aux camelots de prendre des journaux pour la distribution ou de tenter d’en diffuser de façon indépendante. Les distributeurs et distributrices qui ne coopéraient pas étaient souvent battu-e-s. » [Anatoly Dubovik 2008]

« Les anarchistes ont attribué un rôle spécial aux opérations de combat contre les autorités. À la différence des terroristes politiques poursuivant exclusivement les officiers impériaux, les anarchistes dirigèrent une activité insurrectionnelle contre les bourgeois et les gérants d’usines, coupables d’une exploitation particulièrement brutale des travailleurs et travailleuses, bien qu’ils et elles ne refusaient pas non plus de porter des coups à l’appareil répressif de l’État. Parmi toutes les opérations de combat des anarchistes qui ont été un succès, il est nécessaire de d’abord mentionner l’expropriation, réalisée collectivement par des ouvriers et ouvrières militant-e-s du Parti social-fédéraliste, (à cette époque) sympathiques aux idées anarchistes, quand dans la ville de Tiflis en octobre 1907, un trésor de 250 000 roubles a été confisqué (une très grande somme pour l’époque). » [Extrait du texte « АНАРХО-КОММУНИСТИЧЕСКОЕ РАБОЧЕЕ ДВИЖЕНИЕ В ЗАКАВКАЗЬЕ 1904-1907 гг. », ]

En 1921, la Géorgie était sous occupation de l’Armée Rouge. Ceci mit fin au mouvement anarchiste géorgien pour près de 100 ans. En Géorgie, le nouveau gouvernement, comme partout ailleurs en Russie soviétique, poursuivait les anarchistes, les assassinait et les jetait en prison. Les seul-e-s qui réussirent à s’en tirer furent ceux et celles qui réussirent à émigrer et à poursuivre la lutte à l’étranger.

Et puis, qu’en est-il de l’anarchisme aujourd’hui?

Le mouvement anarchiste moderne est vraiment apparu très récemment en Géorgie. Tout a commencé au début de l’année 2008. L’anarchisme en Géorgie était alors représenté par une seule personne, âgée de 17 ans qui, pour dire la vérité, avait une très mauvaise compréhension de la théorie et du militantisme anarchiste et de l’histoire du mouvement. Il détestait seulement, de façon instinctive, toutes les formes de pouvoir et comprenait qu’une société basée sur l’oppression et l’injustice devait être abolie. Il a commencé à chercher de l’information, à chercher des gens qui pensaient comme lui et qui l’aideraient à apprendre à militer. Il trouva des gens, mais seulement à l’extérieur de la Géorgie. Il pu entrer en contact avec des membres de la Confédération Révolutionnaire des Anarcho-syndicalistes de N.I. Makhno (RKAS). Ces militant-e-s lui envoyèrent toute la littérature nécessaire et le supportèrent dans les périodes difficiles. Et aujourd’hui… En 2010, en Géorgie, fut créée une section de la RKAS et un syndicat étudiant « Action Directe-Géorgie », affilié à la Confédération Générale du Travail des Anarcho-syndicalistes. Après près d’un siècle, le mouvement révolutionnaire anarchiste renaît en Géorgie.

En Russie, les anarchistes furent durement réprimé-e-s durant la période soviétique et durent entrer dans la clandestinité pour continuer leur lutte révolutionnaire, malgré le fait que plusieurs d’entre eux et elles avaient combattu au front durant la révolution. Y avait-il des anarchistes géorgien-ne-s actifs et actives durant la période soviétique et comment l’étaient-ils et elles?

Malheureusement, je n’ai pas d’information sur les anarchistes géorgien-ne-s durant la période soviétique. Comme je le disais, les bolchéviques ont pratiquement détruit le mouvement dans les années 1921 à 1925.

Et pour conclure, quelles sont les campagnes et les luttes actives de la RKAS à Tbilissi en ce moment?

RKAS-G : Et bien pour répondre, j’aimerais citer un rapport de la RKAS de Géorgie pour 2010.

1) Actions journalières visant à faire de l’éducation populaire parmi les gens de Tbilissi.
2) L’organisation du syndicat étudiant « Action Directe ».
3) L’ouverture d’une librairie libertaire.
4) Deuxième vie pour la maison d’édition « Шрома » (Travail) et « Nobati ». Rassemblement des parutions anarchistes des années 1905 et 1906 et leur réimpression.
5) Conférences sur des sujets anarchistes.
6) Réunions et autoformations hebdomadaires sur des sujets anarchistes.
7) Action de solidarité avec les antifascistes russes dans la campagne de lutte pour la préservation de la forêt de Khimki.
8) Actions de protestation avec Action Directe-Géorgie visant à ce que l’une des facultés de l’École des Arts adopte les bases d’une pédagogie libre anarchiste.

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